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Le rapport à l'autre : le touriste, l'étranger et le nouveau venu

Comme on vient de le voir, la population d'origine aux Salles a du s'habituer à vivre du jour au lendemain avec des inconnus. Alors qu'auparavant tout le monde se connaissait, même ceux qui ne venaient que pour les vacances, les Sallois ont donc vu arriver de nouveaux visages et avec eux de nouvelles habitudes. Dans les premières années sont petit à petit venus de nouveaux habitants, certains venaient tenter leur chance dans l'industrie touristique, d'autres plus âgés sont venus pour leur retraite et d'autres, et certainement les plus voyants venaient pour y passer leurs vacances. Alors toutes ces personnes n'ont pas été perçues au même niveau et n'ont pas été intégrées de la même façon dans la vie du village.

Les nouveaux habitants ont sûrement été les plus rapidement intégrés puisqu'en venant habiter au nouveau village, ils ont contribué à le faire vivre. Bien sûr il y a eu quelques problèmes entre les nouveaux et les anciens car pour ces derniers la référence à l'ancien village revenait souvent, mais d'une manière générale le nouveau Sallois, pour peu qu'il respecte les anciens, était bien accepté. En fait il y a des plusieurs niveaux dans les rapports aux personnes d'origine extérieure, parce que selon le type de fréquentation du territoire, les gens ne viennent pas chercher les mêmes choses. Pour M.C. au village il y a les anciens, les enfants des anciens qui ont des relations fortes avec les anciens, les nouveaux et les touristes. Mais chez les touristes il y a également des degrés de relations. Par exemple les résidents secondaires sont bien acceptés parce qu'ils permettent de faire vivre le village (ce sont surtout des citadins qui viennent le week-end et pendant les vacances, ils sont donc relativement bien intégrés). Ensuite, il y a le touriste qui vient tous les ans et qui fait un peu partie de la vie du village et en dernier lieu il y a le touriste de passage qui ne vient qu'une fois. Avec ce dernier les rapports sont uniquement marchands, il est accepté parce qu'il fait vivre l'économie du village mais les relations ne vont pas plus loin. Ainsi M.A. me disait «Il y a une dame ici, qui a eu beaucoup de mal à accepter de vivre avec les touristes, surtout les allemands elle les détestait. Je crois que c'est parce qu'un membre de sa famille avait fait la guerre contre eux, bref, elle vivait très mal leur présence, mais depuis que sa fille vend des produits sur le marché, elle vient l'aider et là elle accepte mieux leur présence, sûrement parce qu'ils achètent beaucoup». D'une manière générale les rapports entre les Sallois et les autres se passent relativement bien, même s'il y a toujours des heurts entre les deux parties, mais on ne peut pas dire qu'il y ait de règles établies. En fait, plus il y participation de cette population extérieure à la vie du village et à son développement plus elle est acceptée, ainsi M.C. me disait :«Il y a des vacanciers qui sont très bien intégrés dans la vie du village, par exemple il y a un belge qui vient tous les ans avec sa famille et il contribue à la vie du village : il organise les jeux d'enfants sur la plage et comble du sacrilège, c'est lui qui organise le concours de boule, alors vous voyez pour qu'un belge organise le concours de boule il faut qu'il soit bien accepté...». Bien sûr les Sallois ne sont pas des gens renfermés sur eux-mêmes, et tout le monde dirait que c'est normal de côtoyer les nouveaux venus, mais pour les vrais étrangers, ceux qui ne viennent qu'une ou deux fois en vacances, on ne peut pas vraiment dire qu'ils soient bien intégrés, en fait ils cohabitent avec les locaux pour un laps de temps qui généralement n'excède pas un mois. Au mieux on y est indifférent et on profite de leurs capitaux au pire on «s'engueule »avec eux. Ainsi l'année dernière, le garde municipal s'est fait molester par quelques touristes éméchés, l'histoire a fait grand bruit et n'a pas tardé à se savoir dans les villages alentours. Si une bagarre entre Sallois ne serait pas sortie du village, la mésaventure du garde a fait le tour du lac. Mais heureusement tous les problèmes ne prennent pas une telle dimension et la plupart des heurts ne s'arrêtent qu'aux mots. D'après M.A. «C'est parce qu'ils sont sans gêne ou bien qu'il n'ont pas le même fonctionnement que nous. Par exemple, moi j'ai un robinet devant l'hôtel, et un matin je vois un gars avec son camping car qui était tranquillement en train de remplir ses réservoirs d'eau, alors là je dis non. C'est pas que je ne voulais pas lui donner quelques litres d'eau, s'il m'avait demandé la permission, je lui aurais dit oui sans problème, mais lui il se servait comme ça, alors dans ces conditions je ne suis pas d'accord ».

En fait on retrouve aux Salles, un problème connu par toutes les communautés villageoises reconverties dans le tourisme. Mais ici, ce qui est intéressant c'est qu'au moment où viennent les touristes, les véritables étran- gers du village, il n'y a plus d'anciens et de nouveaux Sallois, mais il y a les Sallois qui se serrent les coudes pour défendre leur groupe. L'introduction d'un facteur externe renforce la cohésion du groupe social d'origine.


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